PLAINTE POUR “ATTEINTE ARBITRAIRE À LIBERTÉ PAR PERSONNE DÉPOSITAIRE DE L’AUTORITÉ PUBLIQUE”

Lettre ouverte au Procureur de la République de Paris.

 

Lettre recommandée avec accusé de réception.

Copie au Procureur de la République de Rennes
Copie au Club de la Presse de Bretagne
Copie au Syndicat National des Journalistes
Copie à la Ligue des Droits de l’Homme
Copie mise au service de la Presse

 

Paris, le 27 Juin 2016

 

Monsieur le Procureur de la République de Paris,

Bonjour,

Je m’appelle Gaspard GLANZ. Je réside à Strasbourg.  Je suis né à Strasbourg le 22 avril 1987. Ma profession est Journaliste. Je suis le fondateur et le gérant de la société Taranis (RCS de Rennes) depuis Mars 2012, propriétaire et principal contributeur du site TaranisNews.com. Mon casier judiciaire est vierge.
J’étais à Paris le jeudi 23 juin 2016 en ma qualité de Journaliste Reporter d’Images (JRI). En mission de reportage pour la société de production que j’ai fondé et pour d’autres médias Français, comme à chacune des 18 précédentes journées de mobilisations nationales contre la « Loi Travail » qui se sont déroulées depuis le début du mouvement social, le 9 mars 2016.

C’est dans l’exercice de mes fonctions et en me rendant avec un collègue journaliste (Alexis Kraland du média StreetPolitics) à la manifestation contre la Loi Travail prévue sur la Place de la Bastille à 14h, que j’ai été arrêté et placé en rétention administrative à partir de 12h40. Je venais de me présenter avec mes papiers d’identités et mon sac de tournage ouvert au « premier checkpoint » de la Police, situé au niveau de la bouche de métro du numéro 1, boulevard du Temple. Nous marchions depuis la Place de la République en direction de la Place de la Bastille.

J’ai présenté à l’officier me demandant « d’identifier ma qualité de journaliste par un document officiel » un certificat KBIS de moins de 3 mois indiquant mon statut de gérant de l’entreprise de production de contenus d’information Taranis, enregistré au Registre du Commerce de Rennes. J’ai participé au contrôle de l’intégralité de mon sac de tournage par des officiers, ainsi que du contenu de mes poches. Je tiens à préciser que j’ai coopéré aux injonctions dans le calme, durant la totalité de mon contrôle ainsi que de ma rétention administrative. Les policiers qui ont procédé à notre interpellation ne portaient pas de matricules.
J’ai immédiatement été privé de ma liberté, fouillé une seconde fois et assis de force au sol, entre trois policiers. Sans autorisation de me déplacer, d’utiliser mon téléphone portable ou de communiquer oralement avec d’autres collègues journalistes aux alentours (qui ont par ailleurs été repoussés). J’ai insisté à de multiples reprises pour connaitre le motif légal de mon interpellation qui ne m’a pas été donné dans l’immédiat, et il aura fallut attendre 13h00 pour qu’un autre officier me signifie que j’étais arrêté avec mon collègue journaliste Alexis Kraland pour « attroupement en vue de commettre un délit ».

Nous sommes regroupés avec six présumés manifestants interpellés, avec lesquels nous entrons dans un camion de police qui contient déjà quatre autres personnes, aux alentours de 13h20. La Police nous conduits au commissariat du 18e arrondissement.
Je tiens à préciser que malgré la température extérieure supérieure à 32 degrés durant notre transport et notre rétention (plus de quatre heures), et alors que de nombreuses personnes en ont fait la demande, à de multiples reprises : pas une goutte d’eau ne nous aura été remise par les forces de Police, et il n’aura pas été possible de se rendre aux toilettes. Certains officiers venant même « narguer les manifestants » en buvant ostensiblement de l’eau à la bouteille devant eux (utilisants parfois celles qui appartenaient aux personnes retenues).

Personne ne s’est vu proposer de contacter un avocat ou un médecin (à part les personnes placées en GAV, n’ayant pas la nationalité française ou étant bi-nationaux). Des personnes ont été gardées plus longtemps, mais en ce qui me concerne la rétention aura duré 4h20 . Ce délais est il me semble au delà du maximum légal pour une rétention administrative en France, sans un placement en garde à vue.

– Vu que les faits ce sont produits dans le cadre de mon activité professionnelle de journaliste ,

– Vu que la détention arbitraire des journalistes en amont d’évènements sociaux ou politique est condamné par le droit international, incluant l’intégralité des traités relatifs à cette question ratifiés par la France et traduits en droit français ,

– Vu que les officiers en charge du contrôle ont reconnus eux-même verbalement avoir connaissance de mon entreprise et de mes activités, à la lecture du KBIS présenté ; La question pouvant alors se poser de la nécessité d’être gardé quatre heures de plus pour une « vérification d’identité » ,

– Vu qu’au moins un des officiers commandant la Compagnie d’Intervention à l’origine de notre contrôle et de notre interpellation, est concerné par une enquête de l’Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN) pour des violences volontaires sur des manifestants dans la nuit du 28 avril, sur ce même boulevard du Temple ; Des faits que j’ai en partie filmé et pour lesquels l’IGPN m’a demandé de témoigner dix jours plus tard ,

– Vu que j’ai déposé plainte auprès de l’IGPN à 3 reprises en deux ans (uniquement pour les faits dont je disposais de preuves matérielles) pour « violence volontaire avec arme », « complicité de violence volontaire » avec la double circonstance aggravante qu’elles ont été commises par « un ou des fonctionnaires en charge de l’autorité publique » dans « l’intention de provoquer une mutilation permanente » ; des faits entrainants jusqu’à 21 jours d’Interruption Temporaire de Travail (ITT) et passible de la Cour d’Assises ,

Je souhaite par la présente vous solliciter à ouvrir une enquête sur les faits du jeudi 23 juin 2016, en la confiant si possible à des juges d’instruction indépendants.

Je souhaite par la présente déposer plainte contre X pour « atteinte arbitraire à liberté par personne dépositaire de l’autorité publique ».

Je souhaite recommander, à titre provisoire (car je n’ai signé et on ne m’a remis aucun document), afin de prévenir toute destruction, dissimulation ou altération des preuves nécessaires à la justice :

– que soit saisis les PV d’arrestation, de transport, de placement en rétention administrative et d’audition, censé avoir été rédigés par la police (ou autre corps de force de l’ordre déployé : CDI, SI, BI, BAC, Gendarmerie, CRS, ect …).

– que soit saisit les traces photos, radio, audio et vidéo des forces de l’ordre, y compris les dispositifs intégrés à leurs uniformes ou mis à disposition par la vidéosurveillance de la ville de Paris, lors de l’arrestation et le placement en détention au niveau du numéro 1 boulevard du Temple.

Je souhaite demander une réparation de 2500€ pour le préjudice économique subit par l’entreprise Taranis et provoqué par cette rétention, n’ayant pu fournir les contenus commandés par les clients de la société, ni relayer ceux produits par nos équipes en région.

Je souhaite enfin, en mon nom mais aussi par ma qualité de gérant, au nom des autres collaborateurs de l’entreprise Taranis concernés, que soit ordonné la restitution immédiate du matériel de protection à usage professionnel (lunettes de protection et masque contre le gaz lacrymogène) saisit sans la justification d’un arrêté stipulant l’interdiction de leur détention ou de leur usage : en dates du 23 juin 2016 à Paris (commissariat du 18e arrondissement) et du 31 mai 2016 à Rennes (commissariat de la « Tour d’Auvergne »).

Veuillez accepter, Monsieur, mes salutations distinguées.

Cordialement,

Gaspard GLANZ