14 FAMILLES SYRIENNES DANS UN VILLAGE DU MORBIHAN ? L’EXTRÊME DROITE EN RENFORT DES CONSPIRATIONNISTES ET DES INDÉPENDANTISTES BRETONS

Sérent est un paisible hameau breton de 3000 habitants situé à mi-chemin entre les villes de Rennes et Vannes. On aurait pu n’en entendre jamais parler jusqu’à ce que l’association Coallia ait l’idée de faire réhabiliter une ancienne maison de retraite, afin de pouvoir y accueillir 14 familles syriennes. Un projet voté en conseil municipal de la ville au mois de septembre, mais sans le savoir, les conseillers municipaux ont ouvert la boite de pandore de l’extrême droite indépendantiste, stimulée par des réseaux en pleine campagne pour les élections régionales. La polémique devrait culminer lors d’une manifestation contre la venue des réfugiés à Sérent ce samedi 17 octobre à 11h. Un rassemblement qui a déclenché l’appel à un contre-rassemblement « citoyen » pour certains, « antifasciste » pour d’autres.

 

L’ancienne « Résidence Beaumanoir » de Sérent est un bâtiment en partie insalubre qui nécessite des travaux de rénovation pour accueillir du public. L’association a donc sollicité la Mairie ainsi que les services de l’État, pour faire financer ces travaux et pouvoir y accueillir des familles de réfugiés (une centaine de personnes). La polémique qui s’en est suivie s’est alors développée en trois actes.

Le premier, c’est la une du quotidien local « Le Ploërmelais » daté du 2 octobre. On y découvre une famille de réfugiés marchant devant le bâtiment dans son état actuel, entouré de barrières métalliques. C’est un montage réalisé sur photoshop (particulièrement mal réussit au demeurant) qui a beaucoup fait parler de lui. Jusqu’à être attaqué par le Syndicat National des Journalistes, sous le titre « Le Ploërmelais : truquer les photos pour attiser les peurs ? » et dénonçant une supercherie. Il est notament écrit dans le communiqué du syndicat : « On se pince pour y croire. […] Le cliché de la « une » est uniquement crédité de l’agence EPA. Son trucage n’est pas mentionné. ».

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La une du “Ploermelais” – 2 octobre 2015

Deuxième acte : la reprise politique par les candidats des listes Front National et des collectifs indépendantistes bretons classés à l’extrême droite, comme celui de Boris le Lay (ce ventilateur à haine exilé au Japon pour fuir ses condamnations à de la prison ferme, pour des actes d’incitations à la haine raciale) via son site Breiz Atao, ou comme le site Breizh Info et les organisations d’extrême droite régionalistes telle que Adsav (dont nous avions déjà parlé lors de « l’affaire du Squat de Rennes », et lorsque nous avions interviewé le Collectif Antifasciste Rennais afin de connaitre la monographie de l’extrême droite Bretonne). Finalement c’est Gilles Pennelle, tête de liste du Front National en Bretagne pour les prochaines élections régionales, qui s’est immédiatement rendu dans le village de Sérent pour y faire une vidéo Facebook.

Le troisième acte a été le partage de cette histoire par les sites extrémistes et conspirationnistes. Excités par ces remous mêlant des réfugiés, du régionalisme breton d’extrême droite, une pincée de Front National et un soupçon de citoyens emportés par l’ambiance générale ; des sites comme le Réseau Voltaire ou FdeSouche s’en sont donné à coeur joie. Depuis les réseaux sociaux de ces sites, des appels au harcèlement ont été lancés envers la mairie de Sérent, jusqu’à ce que elle-ci s’en trouve littéralement paralysée et que le standard téléphonique soit fermé.

Comme le révèle le blog « Info-Antiraciste » les commentaires sur la page Facebook « Pas de migrants à Sérent » sont du genre plutôt explicites. Certains proposant carrément, en parlant des réfugiés Syriens, de « les mettre au four » …

En réponse à tout cette agitation en ligne, des habitants de la commune ont créer une autre page « Sérent Terre d’Accueil », mais avec les appels à manifester et à contre-manifester sur la place centrale de ce petit village, il n’est pas certain que les confrontations idéologiques se cantonnent à Facebook très longtemps …

Gaspard GLANZ

Photo d’illustration : Poste frontière de Salzbourg (© TaranisNews 17/09/2015)

Mise à jour le 17/10 à 10h30 : La préfecture vient d’annoncer qu’elle ne retient pas le projet d’accueil des réfugiés à Sérent, officielement pour des raisons techniques “états des locaux et difficultés d’accès à la plateforme de demmandeurs d’asile à située à Rennes”. La mobilisation en faveur de l’accueil des réfugiés est maintenue.